En France, lire n’est pas seulement une activité de loisir : c’est un acte culturel et presque sacré. — In France, reading is much more than a hobby — it’s a cultural ritual, almost a sacred act.
Table des matières||Table of contents
Un pays où les mots ont du pouvoir — A country where words hold power
Les Français aiment lire pour de nombreuses raisons, à la fois historiques, culturelles et sociales. Dans un pays où les écrivains ont souvent façonné les idées et parfois même l'histoire, la lecture occupe une place unique dans la vie quotidienne et l'imaginaire collectif. De Montaigne à Annie Ernaux et Laurent Mauvignier, en passant par Victor Hugo, Albert Camus et Marguerite Duras, les auteurs français ont toujours alimenté le débat public, inspiré la réflexion et accompagné les grandes transformations sociales. En France, les écrivains ont toujours joué un rôle central dans la construction non seulement de la littérature, mais aussi des idées, des valeurs et de l'histoire. Lire, en France, c'est participer à une longue tradition de pensée, de débat et de créativité qui définit l'identité nationale.
The French love reading for many reasons, both historical, cultural, and social. In a country where writers have often shaped ideas and sometimes even history, reading occupies a unique place in daily life and the collective imagination. From Montaigne to Annie Ernaux and Laurent Mauvignier, by way of Victor Hugo, Albert Camus, and Marguerite Duras, French authors have always fueled public debate, inspired reflection, and accompanied major social transformations. In France, writers have always played a central role in shaping not just literature but also ideas, values, and history. To read, in France, is to take part in a long tradition of thought, debate, and creativity that defines the national identity.
Une tradition intellectuelle héritée des Lumières — An intellectual legacy from the Enlightenment
Au 16e siècle le livre devient l’instrument du développement intellectuel. L'imprimerie favorise la circulation des textes et selon un article " Les trois révolutions de la lecture du 16e au 20e siècle" publié par la BnF | LES ESSENTIELS par Guglielmo Cavallo et Roger Chartier. Trouvez à la fin de l'article des extraits avec la traduction en anglais et ci-dessous les transformations qui vont bouleverser la lecture.
In the 16th century, the book became the instrument of intellectual development. Printing facilitated the circulation of texts, and according to the article in French: " Les trois révolutions de la lecture du 16e au 20e siècle" "The Three Revolutions of Reading from the 16th to the 20th Century," published by the BnF | LES ESSENTIELS and written by Guglielmo Cavallo and Roger Chartier. Excerpts with English translations are found at the end of the article, and below are the transformations that would revolutionize reading.
En résumé
In summary
Le goût des Français pour la lecture remonterait au XVIIIᵉ siècle, l’époque des philosophes des Lumières. Lire Rousseau, Diderot ou Voltaire, c’était participer à une révolution des esprits. Qui n'a pas entendu parler des groupes littéraires. Ces salons littéraires furent presque toujours présidés par des femmes. C’est dans leur salon que s’est développée l’habitude de la conversation, et qu’est né l’art de la causerie caractéristique de la société française. Ces salons où l’on s’entretenait de belles choses en général, et surtout des choses de l’esprit, exercèrent une influence considérable sur les mœurs et la littérature.
Les salons littéraires se distinguent des cafés littéraires comme le Procope[1], lieux publics où les discussions se tenaient sans invitation, ni horaire, ni sujet précis.
Aujourd’hui encore, cette tradition se prolonge : la lecture reste un moyen d’exercer son esprit critique, de se forger une opinion et de comprendre le monde. Dans de nombreux cafés parisiens, les touristes peuvent croiser de nombreux lecteurs plongés dans Le Monde diplomatique ou l'Histoire mondiale de la France sous la direction de Patrick Boucheron— preuve que le livre reste une porte ouverte sur la réflexion et la discussion.
[1] Le Café Procope, dit aussi Le Procope, est l'un des plus célèbres cafés-restaurants de Paris, fondé en 1686. Fermé en 1890, puis devenu un établissement de type bouillon Chartier, il rouvre en 1957 sous son nom historique et devient un restaurant, qui est toujours en activité. Il se situe au 13, rue de l'Ancienne-Comédie, dans le quartier de la Monnaie du 6e arrondissement. Il est également accessible par un passage : la cour du Commerce-Saint-André.
The French love of reading dates back to the 18th century, the era of the Enlightenment philosophers. To read Rousseau, Diderot, or Voltaire was to participate in a revolution of the mind. Who hasn't heard of literary circles? These literary salons were almost always presided over by women. It was in their salons that the habit of conversation developed, and that the art of conversation, so characteristic of French society, was born. These salons, where people discussed beautiful things in general, and especially intellectual matters, exerted a considerable influence on customs and literature.
Literary salons are distinct from literary cafés like the Café Procope [1], public places where discussions took place without invitations, schedules, or specific topics.
Even today, this tradition continues: reading remains a way to exercise critical thinking, to form opinions, and to understand the world. In many Parisian cafes, tourists can encounter many readers engrossed in Le Monde diplomatique or the World History of France edited by Patrick Boucheron—proof that the book remains an open door to reflection and discussion.
[1] Café Procope, also known as Le Procope, is one of the most famous café-restaurants in Paris, founded in 1686. Closed in 1890, then transformed into a Bouillon Chartier-style establishment, it reopened in 1957 under its historic name as a restaurant, which it still operates today. It is located at 13 rue de l'Ancienne-Comédie, in the Monnaie district of the 6th arrondissement. It is also accessible via a passagew ay: the Cour du Commerce-Saint-André.
L’école, berceau du goût pour la littérature — School, the cradle of a taste for literature
En France, le roman, la poésie et le théâtre font partie intégrante du parcours scolaire. Dès le collège, les élèves découvrent Hugo, Molière, Zola ou Maupassant. On apprend à lire, à analyser, à commenter : lire devient un exercice de liberté intellectuelle. Les professeurs encouragent la discussion, la nuance, la curiosité — autant d’attitudes qui nourrissent un attachement durable aux livres.
Le saviez-vous ? Le baccalauréat français comprend toujours une épreuve de littérature ou de philosophie, où les candidats doivent commenter un texte ou disserter sur une idée. C’est un passage initiatique que tous les Français connaissent !
In France, novels, poetry, and plays are an integral part of the school curriculum. From middle school onward, students discover Hugo, Molière, Zola, and Maupassant. They learn to read, analyze, and comment: reading becomes an exercise in intellectual freedom. Teachers encourage discussion, nuance, and curiosity—all attitudes that foster a lasting love of books.
Did you know? The French baccalaureate always includes a literature or philosophy exam, where candidates must comment on a text or write an essay on an idea. It's a rite of passage that all French people experience!
Street-Heart by Seth Julien Malland Paris Belleville Graffiti street-art
Le livre, un art de vivre à la française — The book, a French way of life
Lire, en France, c’est aussi un moment pour soi, une manière de se détacher du bruit du monde. On lit dans le train, au café, dans un jardin, sur une plage bretonne ou un balcon parisien. C’est une habitude profondément ancrée dans le quotidien, qui reflète le plaisir de la lenteur, la recherche du sens et le refus du superficiel.
“Lire, c’est voyager sans bouger”, écrivait Victor Hugo. Cette phrase résume parfaitement la philosophie française du livre.
In France, reading is also a moment for oneself, a way to disconnect from the noise of the world. People read on the train, in cafés, in gardens, on a Breton beach, or on a Parisian balcony. It's a deeply ingrained habit, reflecting the pleasure of slowing down, the search for meaning, and a rejection of superficiality.
“To read is to travel without moving,” wrote Victor Hugo. This sentence perfectly sums up the French philosophy of books.
Les librairies et le prix unique du livre : une exception culturelle — Bookstores and fixed book prices: a cultural exception
La France protège son marché du livre comme un trésor. Depuis la loi Lang de 1981, chaque ouvrage a le même prix dans toutes les librairies : une mesure destinée à préserver les libraires indépendants face aux grandes surfaces et plateformes en ligne. Résultat : la France compte plus de 3 000 librairies indépendantes, un record en Europe.
Le saviez-vous ? Paris abrite la célèbre Shakespeare and Company, librairie anglophone fondée en 1951 par l'Américain George Whitman, devenue un lieu mythique pour les écrivains et les lecteurs du monde entier.
France protects its book market like a treasure. Since the Lang Law of 1981, every book has the same price in all bookstores: a measure designed to protect independent booksellers from supermarkets and online platforms. As a result, France has more than 3,000 independent bookstores, a record in Europe.
Did you know? Paris is home to the famous Shakespeare and Company, an English-language bookstore founded in 1951 by American George Whitman, which has become a legendary place for writers and readers from all over the world.
Lire: une pratique essentielle pour les Français— Reading: an essential practice for the French
1. Amélioration de la grammaire
La lecture régulière expose le lecteur à des phrases correctement construites, à l’usage précis des temps verbaux, des accords et des structures syntaxiques. Pour les Français, cela permet de :
- Comprendre intuitivement les règles grammaticales sans passer par la mémorisation abstraite.
- Assimiler l’usage correct des accords, des prépositions et des conjugaisons complexes.
- Enrichir la capacité à construire ses propres phrases avec fluidité et précision.
Exemple : Lire des romans classiques comme Les Misérables ou Madame Bovary permet de voir en contexte l’usage du subjonctif ou des propositions relatives, ce qui renforce la maîtrise grammaticale.
2. Renforcement de l’orthographe
La lecture fréquente est l’un des moyens les plus efficaces pour améliorer l’orthographe. Elle permet de :
- Reconnaître visuellement les mots correctement écrits.
- Détecter les erreurs fréquentes dans son propre écrit en comparant avec des textes fiables.
- Enrichir le vocabulaire, ce qui réduit les approximations orthographiques.
Exemple : En lisant des journaux comme Le Monde ou Libération, le lecteur voit la graphie correcte des mots et des expressions modernes, ce qui limite les fautes d’orthographe dans ses écrits.
3. Développement des compétences en communication
Lire améliore directement la capacité à s’exprimer, tant à l’écrit qu’à l’oral :
- Enrichissement du vocabulaire : connaître plus de mots permet de s’exprimer plus clairement et précisément.
- Meilleure structuration des idées : la lecture de textes organisés habitue à penser et présenter ses arguments de façon logique.
- Sensibilité au style et au registre : la lecture de différents genres (romans, essais, poésie, articles) permet d’adapter son langage à son interlocuteur ou au contexte.
Les Français qui lisent régulièrement sont souvent plus à l’aise dans les débats, les écrits professionnels ou les discussions informelles, car ils peuvent puiser dans un vocabulaire riche et adapté. Pour les Français, la lecture est une pratique essentielle qui affine la grammaire par l’exposition répétée aux structures correctes, renforce l’orthographe par la familiarisation avec l’écriture correcte des mots, améliore la communication en enrichissant le vocabulaire et la capacité à structurer les idées. Petit conseil pratique : lire chaque jour même 15-20 minutes d’un texte varié (journal, roman, essai) a un impact significatif sur ces compétences, surtout lorsqu’on prend le temps de réfléchir au style et au vocabulaire rencontré.
1. Improved Grammar
Regular reading exposes the reader to correctly constructed sentences, the precise use of verb tenses, agreement, and syntactic structures. For French speakers, this allows them to:
- Intuitively understand grammatical rules without resorting to abstract memorization.
- Assimilate the correct use of agreement, prepositions, and complex conjugations.
- Enhance their ability to construct their own sentences fluently and precisely.
Reading classic novels like Les Misérables or Madame Bovary allows one to see the use of the subjunctive mood or relative clauses in context, which reinforces grammatical mastery.
2. Strengthening Spelling
Frequent reading is one of the most effective ways to improve spelling. It allows you to:
- Visually recognize correctly spelled words.
- Detect common errors in your own writing by comparing it with reliable texts.
- Enrich your vocabulary, which reduces spelling mistakes.
By reading newspapers like Le Monde or Libération, readers see the correct spelling of modern words and expressions, which limits spelling errors in their writing.
3. Developing Communication Skills
Reading directly improves the ability to express oneself, both in writing and orally:
-
- Vocabulary enrichment: knowing more words allows one to express oneself more clearly and precisely.
- Better structuring of ideas: reading organized texts helps one to think and present arguments logically.
- Sensitivity to style and register: reading different genres (novels, essays, poetry, articles) allows one to adapt one's language to one's interlocutor or the context.
French people who read regularly are often more comfortable in debates, professional writing, or informal discussions, because they can draw on a rich and appropriate vocabulary. For the In French, reading is an essential practice that refines grammar through repeated exposure to correct structures, strengthens spelling by familiarizing oneself with the correct spelling of words, and improves communication by enriching vocabulary and the ability to structure ideas. A little practical tip: reading even 15-20 minutes of a varied text (newspaper, novel, essay) every day has a significant impact on these skills, especially when you take the time to reflect on the style and vocabulary encountered.
Une addiction lexicale : "Du coup"... L'expression qui a envahi toutes nos conversations
Il y a quelques années, une amie m'a surprise en répétant "du coup" à chaque phrase. Récemment, encore plus surprenant une présantatrice sur la chaîne France Info, n'hésitait pas à placer cette expression. Cette imprecision peut faire sourire ou se demander pourquoi appauvrir à un tel point nos échanges verbaux. Mais que voulaient-elles dire? Ne serait-ce pas plus facile et plus claire de dire :
A Lexical Addiction: "Du coup"... The Expression That Has Invaded All Our Conversations.
A few years ago, a friend surprised me by repeating "du coup" in every sentence. Recently, even more surprisingly, a presenter on the channel France Info didn't hesitate to use this expression. This imprecision might make us smile or wonder why impoverish our verbal exchanges to such an extent. But what did they mean? Wouldn't it be easier and clearer to say:
Lire pour stimuler la créativité et l'imagination— Reading to stimulate creativity and imagination
Les Français lisent pour s'évader et approfondir leurs connaissances. La lecture a de nombreux effets positifs sur la vie quotidienne des Français. Elle améliore les compétences linguistiques, enrichit le vocabulaire et renforce la compréhension de la langue. De plus, elle stimule la créativité et l'imagination, notamment chez les enfants et les adolescents. Par exemple : le succès continu des autobiographies et des journaux intimes, de L’Amant de Duras à Les Années d’Annie Ernaux, ou encore le dernier Goncourt 2025, La maison vide de Laurent Mauvignier montre que les lecteurs français aiment se reconnaître dans les mots des autres.
Ne manquez pas de lire l'article Comment la lecture « enclenche une véritable symphonie dans le cerveau., par Pascale Santi, publié le 20 octobre 2025 dans Le Monde. "Les neuroscientifiques ont analysé les mécanismes en œuvre et sont unanimes sur les bienfaits de la lecture sur les capacités cognitives. Ils encouragent cette activité dès le plus jeune âge alors que les Français lisent de moins en moins consacrant plus de temps aux écrans." Un article riche en informations et suggestions d'autres lectures sur ce sujet.
Baromêtre. Les Français et la lecture Résultats 2025 PDF Préparé pour le Centre national du livre (CNL) Par Etienne Mercier, Alice Tétaz et Alexandre Leray
The French read to escape and deepen their knowledge. Reading has many positive effects on the daily lives of the French. It improves language skills, enriches vocabulary, and strengthens comprehension of the language. Moreover, it stimulates creativity and imagination, particularly in children and teenagers. For example, the continued success of autobiographies and diaries, from Duras's *The Lover* to Annie Ernaux's *The Years*, or even the latest Goncourt Prize winner in 2025, *The Empty House* by Laurent Mauvignier, shows that French readers enjoy recognizing themselves in the words of others. Don't miss the article *How Reading 'Unleashes a True Symphony in the Brain'*, par Pascale Santi, published on October 20, 2025 in Le Monde. "Neuroscientists have analyzed the mechanisms at work and are unanimous on the benefits of reading on cognitive abilities. They encourage this activity from a very young age, while the French are reading less and less, devoting more and more time to screens." An article rich in information and suggestions for further reading on this topic.
Barometer. The French and Reading: 2025 Results PDF Prepared for the National Book Centre (CNL) By Etienne Mercier, Alice Tétaz and Alexandre Leray
Lire pour mieux se connaître — Read to get to know yourself better
Enfin, les Français lisent parce qu’ils cherchent à se comprendre eux-mêmes. Le roman, l’essai, la poésie sont autant de miroirs de l’âme. Dans une société souvent perçue comme exigeante, la lecture offre un espace de liberté, d’intimité, d’émotion. Elle permet d’explorer des thèmes universels — l’amour, la liberté, la mort, le temps — tout en nourrissant un goût très français pour la conversation et le débat d’idées.
Par exemple : le succès continu des autobiographies et des journaux intimes, de L’Amant de Duras à Les Années d’Annie Ernaux, ou encore le dernier Goncourt 2025, La maison vide de Laurent Mauvignier montre que les lecteurs français aiment se reconnaître dans les mots des autres.
Finally, the French read because they seek to understand themselves. Novels, essays, and poetry are all mirrors of the soul. In a society often perceived as demanding, reading offers a space for freedom, intimacy, and emotion. It allows for the exploration of universal themes—love, freedom, death, time—while nurturing a very French taste for conversation and the exchange of ideas.
For example, the continued success of autobiographies and diaries, from Duras's *The Lover* to Annie Ernaux's *The Years*, or even the latest Goncourt Prize winner in 2025, *The Empty House* by Laurent Mauvignier, shows that French readers like to recognize themselves in the words of others.
Une passion vivante à l’ère du numérique — A living passion in the digital age
Malgré les écrans, la lecture papier reste forte : plus de 85 % des Français déclarent lire au moins un livre par an, et les salons du livre attirent toujours des foules. Les clubs de lecture, les librairies-cafés et les influenceurs littéraires sur Instagram et TikTok (BookTok) renouvellent la façon de lire et de partager les coups de cœur.
Despite screens, printed books remain popular: over 85% of French people say they read at least one book a year, and book fairs still draw large crowds. Book clubs, bookstore cafés, and literary influencers on Instagram and TikTok (BookTok) are reinventing the way we read and share our favorite books.
CONCLUSION
Lire, c’est être français à sa manière. Aimer lire, en France, c’est aimer penser, rêver et débattre. Le livre incarne ce que la culture française valorise le plus : la curiosité, la liberté, l’esprit critique. Qu’il s’agisse d’un roman, d’un essai ou d’une bande dessinée, le livre continue d’être ce lien discret mais essentiel qui unit les Français à leur histoire et à eux-mêmes.
FIN DE L'ARTICLE || END of ARTICLE
À découvrir — To discover
Les trois révolutions de la lecture du 16e au 20e siècle : Extraits de l'article — Excerpts from the article "The three revolutions of reading from the 16th to the 20th century".
Au 16e siècle le livre devient l’instrument du développement intellectuel
La première transformation qui affecte les pratiques de lecture à l’âge moderne est technique : elle bouleverse à la mi-15e siècle les modes de reproduction des textes et de production du livre.
L’imprimerie favorise la circulation des textes
... Chaque lecteur peut avoir accès à un plus grand nombre de livres ; chaque livre peut atteindre un plus grand nombre de lecteurs...L’imprimerie modifie peu les pratiques de lecture ...
Avec l’imprimerie la structure du livre reste inchangée
La lecture silencieuse ou la vraie révolution de lecture
...La première « révolution de la lecture » de l’âge moderne est donc largement indépendante de la révolution technique qui modifie au 15e siècle la production du livre. Elle s’enracine sans doute plus fortement dans la mutation qui transforme aux 12e et 13e siècles la fonction même de l’écrit, lorsqu’au modèle monastique de l’écriture, qui assigne à l’écrit une tâche de conservation et de mémoire largement dissociée de toute lecture, succède le modèle scolastique de la lecture qui fait du livre à la fois l’objet et l’instrument du travail intellectuel. Quelle qu’en soit l’origine, l’opposition entre lecture nécessairement oralisée et lecture possiblement silencieuse marque une césure capitale. La lecture silencieuse, en effet, instaure un commerce avec l’écrit qui peut être plus libre, plus secret, tout intérieur. Elle permet une lecture rapide et habile que ne déroutent ni les complexités de l’organisation de la page, ni les relations multiples établies entre le discours et les gloses, les citations et les commentaires, les textes et les index. Elle autorise aussi des utilisations différenciées du même livre, lu à haute voix, pour les autres ou avec d’autres, lorsque la sociabilité ou le rituel l’exigent, et lu en silence, pour soi-même, dans la retraite du cabinet, de la bibliothèque ou de l’oratoire.
La révolution du lire a précédé celle du livre
La révolution du lire a donc précédé celle du livre puisque la possibilité de la lecture en silence est, au moins pour les lecteurs lettrés, clercs d’Église ou notables laïques, très antérieure à la mi-15e siècle. Leur façon nouvelle de considérer et manier l’écrit ne doit donc pas être imputée trop hâtivement à la seule innovation technique qu’est l’invention de l’imprimerie....
Les Lumières et la fureur de lire
De même, la seconde « révolution de la lecture » de l’âge moderne advient avant l’industrialisation de la fabrication de l’imprimé. Selon une thèse classique, dans la seconde moitié du 18e siècle, à la lecture « intensive » succéderait une lecture qualifiée d’ « extensive ». Le lecteur « intensif » était confronté à un corpus limité et fermé de livres, lus et relus, mémorisés et récités, entendus et sus par cœur, transmis de génération en génération. Les textes religieux, et en premier lieu la Bible en terre réformée, étaient les objets privilégiés de cette lecture fortement empreinte de sacralité et d’autorité...
Le lecteur de roman transfère sur des livres profanes des pratiques de lecture de textes religieux
Le roman est constamment relu, su par cœur, cité et récité. Son lecteur est envahi par un texte qu’il habite ; il s’identifie aux personnages et déchiffre sa propre vie à travers les fictions de l’intrigue. Dans cette « lecture intensive » d’un nouveau type, c’est l’entière sensibilité qui se trouve engagée. Le lecteur, plus souvent la lectrice, ne peut retenir ni son émotion ni ses larmes ; bouleversé, il prend lui-même la plume pour dire ses sentiments et, surtout, pour écrire à l’écrivain qui, par son œuvre, est devenu un véritable directeur de conscience et d’existence. Les lecteurs des romans ne sont pas les seuls lecteurs « intensifs » à cette époque. La lecture des plus nombreux et des plus humbles, nourrie par les titres du colportage, demeure commandée par les habitudes anciennes plus que par la découverte de l’inédit...
La nostalgie de la lecture à la veillée
Le motif si souvent manié à la fin du siècle par les peintres et les écrivains d’une lecture paysanne, patriarcale et biblique, faite à la veillée par le père de famille qui lit à haute voix pour la maisonnée assemblée, énonce le regret d’une lecture perdue. Dans cette représentation idéale de l’existence paysanne, chère à l’élite lettrée, la lecture communautaire signifie un monde où le livre est révéré et l’autorité respectée. Avec cette figure mythique, ce sont, à l’évidence, les gestes ordinaires d’une lecture contraire, citadine, négligente, désinvolte, qui se trouvent dénoncés. Décrite comme un danger pour l’ordre politique, comme un « narcotique » (c’est le mot de Fichte) qui détourne des vraies Lumières, ou comme un dérèglement de l’imagination et des sens, la « fureur de lire » frappe tous les observateurs contemporains. Elle joue à n’en pas douter un rôle essentiel dans les détachements qui, partout en Europe mais tout particulièrement en France, éloignent les sujets de leur prince, et les chrétiens de leurs églises.
In the 16th century, the book became the instrument of intellectual development
The first transformation affecting reading practices in the modern age was technical: in the mid-15th century, it revolutionized the methods of text reproduction and book production.
Printing facilitated the circulation of texts
... Each reader could have access to a greater number of books; Each book can reach a greater number of readers...Printing has little impact on reading practices...
With printing, the structure of the book remains unchanged
Silent reading, or the true reading revolution
...The first "reading revolution" of the modern age is therefore largely independent of the technological revolution that transformed book production in the 15th century. It is undoubtedly more deeply rooted in the transformation that occurred in the 12th and 13th centuries, altering the very function of writing. The monastic model of writing, which assigned to texts a task of preservation and memory largely separate from any reading, was succeeded by the scholastic model of reading, which made the book both the object and the instrument of intellectual work. Whatever its origin, the opposition between necessarily oral reading and potentially silent reading marks a crucial turning point. Silent reading, in effect, establishes a relationship with the written word that can be freer, more private, entirely internal. It allows for a rapid and skillful reading, undisturbed by the complexities of page layout or the multiple relationships established between the text and glosses, quotations and commentaries, texts and indexes. It also allows for different uses of the same book: read aloud, for others or with others, when sociability or ritual requires it, and read silently, for oneself, in the seclusion of a study, library, or oratory.
The revolution of reading preceded that of the book.
The revolution of reading thus preceded that of the book, since the possibility of silent reading, at least for literate readers, whether clerics or lay notables, predates the mid-15th century. Their new way of considering and handling written material should therefore not be too hastily attributed solely to the technical innovation of the invention of printing....
The Enlightenment and the Passion for Reading
Similarly, the second “reading revolution” of the modern age occurred before the industrialization of printing. According to a classic theory, in the second half of the 18th century, “intensive” reading gave way to what was termed “extensive” reading. The “intensive” reader was confronted with a limited and closed corpus of books, read and reread, memorized and recited, heard and known by heart, passed down from generation to generation. Religious texts, and first and foremost the Bible in Reformed lands, were the privileged objects of this reading, which was deeply imbued with sacredness and authority...
The novel reader transfers reading practices from religious texts to secular books
The novel is constantly reread, memorized, quoted, and recited. Its reader is immersed in a text they inhabit; they identify with the characters and decipher their own life through the fictions of the plot. In this new kind of "intensive reading," the entire sensitivity is engaged. The reader, more often a woman, cannot contain their emotion or their tears; deeply moved, they take up the pen themselves to express their feelings and, above all, to write to the author who, through their work, has become a true guide of conscience and existence. Readers of novels were not the only "avid" readers at that time. The reading habits of the vast majority, including the humblest, fueled by chapbooks, remained dictated more by old habits than by the discovery of the new...
The Nostalgia for Evening Reading
The motif so often used at the end of the century by painters and writers—that of a peasant, patriarchal, and biblical reading, done evenings by the father of the family reading aloud to the assembled household—expresses the regret for a lost tradition of reading. In this idealized representation of peasant life, dear to the educated elite, communal reading signifies a world where books are revered and authority respected. With this mythical figure, it is clearly the ordinary gestures of a contrasting, urban, careless, and casual reading that are being denounced. Described as a danger to the political order, as a "narcotic" (Fichte's word) that diverts people from true Enlightenment ideals, or as a derangement of the imagination and senses, the "frenzy of reading" struck all contemporary observers. It undoubtedly played a crucial role in the detachments that, throughout Europe but especially in France, alienated subjects from their prince and Christians from their churches.
Au 20e siècle, la transmission électronique des texte
Avec la transmission électronique des textes et les manières de lire qu’elle impose advient la troisième révolution de la lecture depuis le Moyen Âge. Lire sur un écran, en effet, n’est pas lire dans un codex. La nouvelle représentation de l’écrit modifie, en premier lieu, la notion de contexte, substituant à la contiguïté physique entre des textes présents dans un même objet (un livre, une revue, un journal) leur position et distribution dans des architectures logiques – celles qui gouvernent les bases de données, les fichiers électroniques, les répertoires et les mots-clefs qui rendent possible l’accès à l’information. Elle redéfinit, aussi, la « matérialité » des œuvres en brisant le lien physique qui existait entre l’objet imprimé (ou manuscrit) et le ou les textes qu’il porte, et en donnant au lecteur, et non plus à l’auteur ou à l’éditeur, la maîtrise sur le découpage ou l’apparence du texte qu’il fait apparaître sur l’écran. C’est donc tout le système d’identification et de maniement des textes qui se trouve bouleversé. En lisant sur un écran, le lecteur d’aujourd’hui – et, plus encore, de demain – retrouve quelque chose de la posture du lecteur de l’Antiquité qui lisait un rouleau.
Au croisement des logiques propres au rouleau et au codex
Mais, et la différence n’est pas mince, avec l’ordinateur, le texte se déroule verticalement et il se trouve doté de tous les repérages propres au codex : pagination, index, tables, etc. Le croisement des deux logiques à l’œuvre dans la lecture des supports précédents de l’écrit manuscrit ou imprimé (le volumen, le codex) indique clairement que se trouve établie une relation au texte tout à fait originale et inédite.
Elle s’inscrit dans une complète réorganisation de l’ « économie de l’écriture ». En assurant une possible simultanéité à la production, à la transmission et à la lecture d’un même texte, en unissant dans un même individu les tâches, toujours distinctes jusqu’ici, de l’écriture, de l’édition et de la distribution, la représentation électronique des textes annule les distinctions anciennes qui séparaient les rôles intellectuels et les fonctions sociales. Du coup, elle oblige à redéfinir toutes les catégories qui, jusqu’à maintenant, habitaient les attentes et les perceptions des lecteurs. Il en va ainsi des concepts juridiques qui définissent le statut de l’écriture (copyright, propriété littéraire, droits d’auteur, etc.), des catégories esthétiques qui, depuis le 18e siècle, caractérisent les œuvres (intégrité, stabilité, originalité), ou des notions réglementaires (dépôt légal, bibliothèque nationale) et bibliothéconomiques (catalogage, classement, description bibliographique) qui ont été pensées pour une autre modalité de la production, de la conservation et de la communication de l’écrit.Le lecteur devient coauteur du texte
Depuis le 16e siècle, c’est-à-dire depuis le temps où l’imprimeur a pris à sa charge les signes, les marques et les titres qui, au temps des incunables, étaient ajoutés à la main sur la page imprimée par le correcteur ou le possesseur du livre, le lecteur ne peut insinuer son écriture que dans les espaces vierges du livre. L’objet imprimé lui impose sa forme, sa structure, ses espaces. Il ne suppose aucunement la participation matérielle, physique, de celui qui le lit. Si le lecteur entend, néanmoins, inscrire sa présence dans l’objet, il ne peut le faire qu’en occupant, subrepticement, les lieux du livre délaissés par la composition typographique : intérieurs de la reliure, feuillets laissés en blanc, marges du texte, etc.
Avec le texte électronique, il en va autrement. Non seulement le lecteur peut soumettre les textes à de multiples opérations (il peut les indexer, les annoter, les copier, les déplacer, les recomposer, etc.), mais plus encore, il peut en devenir le coauteur. La distinction, immédiatement visible dans le livre imprimé, entre l’écriture et la lecture, entre l’auteur du texte et le lecteur du livre, s’efface au profit d’une réalité différente : le lecteur devant écran devient un des acteurs d’une écriture à plusieurs mains ou, à tout le moins, il se trouve en position de constituer un texte nouveau à partir de fragments librement découpés et assemblés. Comme le propriétaire de manuscrits, qui pouvait réunir dans un même recueil des œuvres de nature fort diverses, le lecteur de l’âge électronique peut construire à sa guise des ensembles textuels originaux dont l’existence, l’organisation et l’apparence ne dépendent que de lui. Mais, de plus, il peut à tout moment intervenir sur les textes, les modifier, les réécrire, les faire siens. C’est ainsi toute la relation à l’écrit qui se trouve profondément bouleversée.Le rêve de la bibliothèque universelle devient accessible
Depuis l’Antiquité, les hommes d’Occident ont été hantés par la contradiction entre, d’un côté, le rêve d’une bibliothèque universelle, rassemblant tous les textes jamais écrits, tous les livres jamais publiés, et, d’un autre, la réalité, forcément décevante, des bibliothèques réelles qui, aussi grandes soient-elles, ne peuvent fournir qu’une image partielle, lacunaire et mutilée du savoir universel. L’Occident a donné deux figures exemplaires et mythiques à cette nostalgie de l’exhaustivité impossible et désirée : la bibliothèque d’Alexandrie et celle de Babel. L’électronique, qui permet la communication des textes à distance, annule la distinction, jusqu’ici ineffaçable, entre le lieu du texte et le lieu du lecteur. Elle rend pensable, promis, le rêve ancien. Détaché de ses matérialités et de ses localisations anciennes, le texte en sa représentation électronique peut théoriquement atteindre n’importe quel lecteur en n’importe quel lieu.
À supposer que tous les textes existants, manuscrits ou imprimés, soient convertis en textes électroniques, c’est l’universelle disponibilité du patrimoine écrit qui deviendrait possible. Tout lecteur, là où il se trouve, à la seule condition que ce soit devant un poste de lecture connecté au réseau qui assure la distribution des documents informatisés, pourra consulter, lire, étudier n’importe quel texte, quelles qu’aient été sa forme et sa localisation originelles.Des pratiques de lecture sans précédents
La lecture traditionnelle est, dans notre monde contemporain, tout ensemble concurrencée par l’image et menacée de perdre les répertoires, les codes et les comportements qu’inculquaient les normes scolaires ou sociales. À cette première « crise » s’en ajoute une autre, encore minoritaire et inégalement sensible selon les pays : celle qui transforme le support de l’écrit et qui, du coup, oblige le lecteur à de nouveaux gestes, à de nouvelles pratiques intellectuelles. Du codex à l’écran, le pas est aussi important que celui qui a mené du rouleau au codex. Avec lui, c’est l’ordre des livres qui fut celui des hommes et des femmes d’Occident depuis les premiers siècles de l’ère chrétienne qui est mis en question. De nouvelles manières de lire sont ainsi affirmées ou imposées qu’il n’est pas encore possible de caractériser totalement mais qui, à n’en pas douter, impliquent des pratiques de la lecture sans précédents.
In the 20th Century, the Electronic Transmission of Texts
With the electronic transmission of texts and the reading methods it imposes, the third revolution in reading since the Middle Ages has occurred. Reading on a screen, in fact, is not the same as reading in a codex. The new representation of writing modifies, first and foremost, the notion of context, substituting for the physical contiguity between texts present in the same object (a book, a magazine, a newspaper) their position and distribution within logical architectures – those that govern databases, electronic files, directories, and the keywords that make access to information possible. It also redefines the "materiality" of works by breaking the physical link that existed between the printed (or manuscript) object and the text(s) it contains, and by giving the reader, rather than the author or publisher, control over the layout or appearance of the text displayed on the screen. Thus, the entire system of identifying and manipulating texts is revolutionized. By reading on a screen, today's reader—and even more so tomorrow's—rediscovers something of the posture of the ancient reader who read a scroll.
At the Crossroads of the Logics of the Scroll and the Codex
But, and this is a significant difference, with the computer, the text unfolds vertically and is equipped with all the features characteristic of the codex: pagination, index, tables, etc.
The convergence of the two logics at work in reading previous forms of handwritten or printed text (the volumen, the codex) clearly indicates the establishment of a completely original and unprecedented relationship to the text. This relationship is part of a complete reorganization of the "economy of writing." By ensuring the potential simultaneity of the production, transmission, and reading of the same text, by uniting in a single individual the tasks—always distinct until now—of writing, editing, and distribution, the electronic representation of texts obliterates the old distinctions that separated intellectual roles and social functions. Consequently, it forces a redefinition of all the categories that, until now, have shaped readers' expectations and perceptions. This is also true of the legal concepts that define the status of writing (copyright, literary property, author's rights, etc.), the aesthetic categories that, since the 18th century, have characterized works (integrity, stability, originality), and the regulatory (legal deposit, national library) and library science (cataloging, classification, bibliographic description) notions that were conceived for a different modality of the production, preservation, and communication of written material.
The reader becomes a co-author of the text
Since the 16th century, that is, since the time when the printer took over the responsibility for the signs, marks, and titles that, in the days of incunabula, were added by hand to the printed page by the proofreader or the owner of the book, the reader. The printed word can only insinuate its writing into the blank spaces of the book. The printed object imposes its form, its structure, its spaces. It in no way presupposes the material, physical participation of the reader. If the reader nevertheless intends to inscribe their presence in the object, they can only do so by surreptitiously occupying the spaces in the book left untouched by the typographic composition: the inside of the binding, blank pages, margins of the text, etc. With electronic text, it is different. Not only can the reader subject texts to multiple operations (they can index them, annotate them, copy them, move them, rearrange them, etc.), but even more, they can become its co-author. The distinction, immediately visible in the printed book, between writing and reading, between the author of the text and the reader of the book, fades in favor of a different reality: the reader in front of a screen becomes one of the actors in a collaborative writing process or, at the very least, finds themselves in a position to create a new text from freely cut and assembled fragments. Like the owner of manuscripts, who could gather works of very diverse nature in a single collection, the reader of the digital age can construct original textual ensembles at will, whose existence, organization, and appearance depend solely on them. But, moreover, they can intervene in the texts at any time, modify them, rewrite them, make them their own. It is thus the entire relationship to the written word that is profoundly transformed.
The Dream of the Universal Library Becomes Accessible
Since antiquity, Westerners have been haunted by the contradiction between, on the one hand, the dream of a universal library, gathering all texts ever written, all books ever published, and, on the other hand, the inevitably disappointing reality of actual libraries which, however large they may be, can only provide a partial, incomplete, and fragmented image of universal knowledge. The West has given two exemplary and mythical figures to this nostalgia for impossible and desired exhaustiveness: the Library of Alexandria and the Library of Babel. Electronics, which allows for the communication of texts over long distances, erases the hitherto indelible distinction between the location of the text and the location of the reader. It makes the ancient dream conceivable, I promise. Detached from its materiality and its former locations, the text in its electronic representation can theoretically reach any reader anywhere. Assuming that all existing texts, handwritten or printed, are converted into electronic texts, the universal availability of the written heritage would become possible. Any reader, wherever they may be, provided they are in front of a reading station connected to the network that ensures the distribution of computerized documents, will be able to consult, read, and study any text, whatever its original form and location.
Unprecedented Reading Practices
Traditional reading, in our contemporary world, is simultaneously challenged by images and threatened with losing the repertoires, codes, and behaviors instilled by school or social norms. To this first “crisis” is added another, still a minority phenomenon and unevenly felt across different countries: the transformation of the written medium itself, which consequently compels the reader to adopt new gestures and new intellectual practices. The leap from codex to screen is as significant as the one that led from scroll to codex. With it, the very order of books that had governed Western men and women since the early centuries of the Christian era is called into question. New ways of reading are thus being asserted or imposed, which cannot yet be fully characterized but which undoubtedly involve unprecedented reading practices.
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